Le blog du Cybercuré

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mardi 21 septembre 2010

Homélie du dimanche 26 septembre

Amos 6, 1a, 4-7

Nous retrouvons aujourd'hui le prophète Amos, le berger hirsute de Téqoa, le héraut de la justice. Amos, se souvenant du temps où, sur les pistes du Sinaï, le peuple de Dieu vivait une authentique vie de pauvreté et de liberté, Amos ne peut accepter cette escalade dans laquelle s'est lancée la nouvelle société, société de consommation, dans les royaumes de Jérusalem et de Samarie. Le schisme à l'intérieur du peuple élu, n'est-il pas déjà un scandale ? Mais quel scandale encore plus grand que cette recherche effrénée du confort au prix de tant de violences et d'injustices ! La jouissance des uns ne se procure que par l'oppression et l'exploitation des autres. L'abîme se creuse chaque jour un peu plus entre les riches et les pauvres, alors que naguère ils partageaient sous la tente les mêmes biens, les mêmes risques, les mêmes joies.
La richesse devrait augmenter le bien-être général. Hélas, elle ne fait qu'aviver l'égoïsme des possédants.
Amos voit les signes de richesse qui s'accumulent. On festoie, on boit, on ripaille, on se vautre sur des divans aux incrustations d'ivoire. C'est trop. Le prophète n'en peut plus parce que Dieu en a assez. La voix du prophète s'élève, terrible, justicière, au milieu de cette corruption pour flétrir ces intolérables violations du droit. Et il entend, venant de l'Assyrie, les chevaliers de l'apocalypse qui vengeront la justice à tel point bafouée.

Le prophète Amos exerçait ses talents, vigoureux, environ 700 ans avant Jésus-Christ. Frédérico Fellini, grand cinéaste italien, a créé le film mémorable : "La dolce vita" en 1960.
Fellini, dans ce film, a dénoncé les commencements de la société pornographique dans laquelle nous barbotons actuellement. Il l'a fait avec un grand prestige, en marquant des points.
Ne voilà-t-il pas que ce titre "La dolce vita" est repris, actuellement,  par Gaz de France pour vanter les mérites de son combustible, en changeant complètement la signification de l'expression. A l'origine, le titre du film, était, à juste titre, péjoratif, il dénonçait un état d'esprit libidineux.
50 ans après, on retourne les choses, le mal est reconverti en bien, même le péjoratif est récupéré et recyclé dans la société de consommation triomphante. Je gage en effet, que les braves gens qui se chauffent au gaz trouveront que cette "vie en douceur" est tout à fait innocente.
Le pauvre Amos n'aurait pas imaginé un tel retournement. Nous autres chrétiens, ne soyons pas dupes, ne soyons pas des fils de pub.

Amen.

lundi 13 septembre 2010

Homélie du dimanche 19 septembre

Homélie donnée par l'abbé Pierre Guéroult pour le 25ème dimanche ordinaire C, le samedi 18 septembre 2010 à 18h30 à Beuzeville la Grenier et le dimanche 19 septembre à 10h30 à Bolbec.

Le travail du prédicateur aujourd'hui est difficile, c'est à n'y rien comprendre, Jésus semble se faire le défenseur d'une espèce de combinard. En effet, ce mauvais gérant, avec habileté, trouve une astuce pour se faire bien voir des créanciers de son patron. Il a trafiqué les factures et embrouillé les comptes.J'ai pensé qu'on pouvait expliquer cet évangile par l'idée de "caricature".Un dessin caricatural, dans un journal, cela consiste à forcer le trait afin de mieux faire comprendre une chose cachée et, quelque peu, secrète. Il me semble qu'aujourd'hui Jésus se livre à cette activité, avec un certain toupet, sans oublier une bonne dose d'humour. Oui Jésus joue la provocation afin de nous faire réfléchir. Il sait que notre rapport à l'argent est compliqué, souvent ambigu. Certes nous cherchons, et c'est bien normal, à gagner notre vie, mais nous demandons souvent à l'argent autre chose : une forme de reconnaissance, une manière de nous rassurer sur ce que nous valons, sur ce que nous "pesons" face aux autres... Nous rêvons de gagner plus, pas uniquement en fonction de nos besoins réels, mais avec l'illusion que plus notre compte en banque augmentera, plus nous aurons le sentiment d'exister voire, comble de la méprise, d'être heureux.En fait, réalité difficile à accepter, c'est l'argent que nous possédons qui nous possède. Notre obscur besoin du "toujours plus" fait parfois de nous des "possédés".Jésus n'est pas naïf, il sait que les hommes ont besoin de revenus pour vivre et aujourd'hui encore, la doctrine sociale de l'Eglise ne condamne pas l'argent. A condition que nous respections le proverbe : "l'argent est un bon serviteur mais un mauvais maître".Certes l'intendant, dont par l'évangile,  est un filou, mais, nous, en se faisant des amis avec l'argent trompeur, disons carrément la monnaie de singe, on fait passer les espèces, du rang de "but" à celui de "moyen".Chers amis, second point de notre réflexion, je voudrais insister avec vous sur la conclusion que Jésus a donnée à l'épisode : "les fils de lumière sont moins dégourdis pour le bien que les fils des ténèbres quand il s'agit de leurs affaires".Je m'excuse de citer un exemple personnel, cette phrase m'a souvent guidée dans certaines orientations de mon ministère sacerdotal, l'importance que j'ai voulu donner aux moyens modernes, comme la photographie, les magnétophones, et depuis 1980,  l'informatique et maintenant l'internet.Mais la parole de Jésus, le reproche qu'il fait aux fils de lumière de manquer d'imagination ne se borne pas à cette application. On pourrait partir de quelques exemples pris dans la vie ordinaire, des gens qui font preuve d'une certaine habileté. Habiles, nous savons l'être pour négocier une augmentation de salaire, inscrire notre enfant dans un établissement réputé, dénicher un vêtement de marque à prix réduit, voire même réduire nos impôts par une astuce... légale ! La question de Jésus est nette : saurons-nous agir avec la même habileté pour faire connaître l'Evangile, renouveler le langage de la foi, rejoindre les petits et les exclus, promouvoir la justice, répandre la paix ?Je termine en précisant que, sans doute, les qualificatifs de "fils de lumière" et "fils des ténèbres" viennent du monastère des moines esséniens, près de la Mer Morte dont on a retrouvé la bibliothèque sur des rouleaux de papyrus et parchemin en 1947.Il est donc à penser que ce groupe de croyants, qui avait pris le maquis devant la corruption des prêtres du temple de Jérusalem, pour s'installer dans le désert, leur philosophie avait quand même, un peu, influencé Jésus puisqu'il leur emprunte certains mots.Résumons en conclusion : 1°) 2000 ans avant Karl Marx, Jésus a dénoncé le pouvoir aliénant de l'argent. 2°) il souhaite vivement que nous soyons des croyants davantage inventifs et imaginatifs.

Amen.

 

Complément : l'Evangile de ce dimanche : 

Il disait encore à ses disciples: "Il était un homme riche qui avait un intendant, et celui-ci lui fut dénoncé comme dilapidant ses biens. Il le fit appeler et lui dit: Qu'est-ce que j'entends dire de toi? Rends compte de ta gestion, car tu ne peux plus gérer mes biens désormais. L'intendant se dit en lui-même: Que vais-je faire, puisque mon maître me retire la gérance? Piocher? Je n'en ai pas la force; mendier? J'aurai honte... Ah! je sais ce que je vais faire, pour qu'une fois relevé de ma gérance, il y en ait qui m'accueillent chez eux.  "Et, faisant venir un à un les débiteurs de son maître, il dit au premier: Combien dois-tu à mon maître? -- Cent barils d'huile, lui dit-il. Il lui dit: Prends ton billet, assieds-toi et écris vite 50. Puis il dit à un autre: Et toi, combien dois-tu? --  Cent mesures de blé, dit-il. Il lui dit: Prends ton billet, et écris 80.  "Et le maître loua cet intendant malhonnête d'avoir agi de façon avisée. Car les fils de ce monde-ci sontplus avisés envers leurs propres congénères que les fils de la lumière. "Eh bien! moi je vous dis: faites-vous des amis avec le malhonnête Argent, afin qu'au jour où il viendra à manquer, ceux-ci vous accueillent dans les tentes éternelles. Qui est fidèle en très peu de chose est fidèle aussi en beaucoup, et qui est malhonnête en très peu est malhonnête aussi en beaucoup. Si donc vous ne vous êtes pas montrés fidèles pour le malhonnête Argent, qui vous confiera le vrai bien? Et si vous ne vous êtes pas montrés fidèles pour le bien étranger, qui vous donnera le vôtre?  "Nul serviteur ne peut servir deux maîtres: ou il haïra l'un et aimera l'autre, ou il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l'Argent."

(Luc 16, 1-13)

Homélie du dimanche 12 septembre

Malgré la beauté de l'évangile de l'Enfant Prodigue (Luc chapitre 15), prenons aujourd'hui pour méditation la première lecture, tirée du livre de l'Exode dans l'Ancien Testament. Ce texte nous raconte l'histoire du Veau d'Or.Vous connaissez la chanson, l'opéra est célèbre : "Le veau d'or est toujours debout"... Benoît XVI, dans sa dernière encyclique, n'a pas oublié de dénoncer les méfaits de l'Argent quand il devient une idole. Cependant, aujourd'hui, en regard de ce texte, je voudrais réfléchir avec vous sur toutes les idoles en général.Vous pourriez dire : cette adoration des animaux sculptés mis à la place du vrai Dieu, c'était bon autrefois. Effectivement les Egyptiens adoraient des animaux et des représentations d'animaux. Certains pensent : à notre époque "moderne", il n'y a plus d'idoles. Il y a bien Johnny, mais enfin, il n'est pas méchant. Il y a sa statue en bois (le veau était en or) qui a monté de 300 à 8000 . La preuve qu'on peut être à la fois moderne et quelque peu naïf.Au fait, l'idolâtrie c'est quoi ? "É-i-do-lonne", ce mot grec qui a donné idole, signifie : "image". Or les Juifs, nos ancêtres dans la foi, Dieu leur avait défendu toute représentation en image ou statue du vrai Dieu. Lors de la prise de Jérusalem, le général romain Pompée pénétrant, à cheval s'il vous plaît, dans le Temple, avait dit : "mais il n'y a rien ici", ce qui voulait dire : il n'y a pas d'idole, pas de statue. Parce que, à Rome, des statues, il y en avait partout, un très grand nombre. De nos jours, on peut se demander si ce n'est pas les médias, et surtout la télévision, qui assurent la promotion d'une certaine idolâtrie. Non pas tellement à cause des vedettes, stars et autres dieux-de-remplacement, mais parce que, un poste de télé, c'est une machine à fabriquer des images, des images qui visent à grignoter la vérité. Ainsi, ce qui passe à la télé, dans l'esprit d'un certain nombre est réputé vrai, tandis que ce qui n'y passe pas, on finit par penser que c'est faux. Jadis il y avait le vrai et le faux, point. Mais maintenant une chose ou une idée, même si elle est fausse, du fait qu'elle passe à la télé, c'est-à-dire transformée en images, devient vraie presque automatiquement, tandis que les réalités qui n'y "passent" pas, même si elles sont vraies, on finit pas penser qu'elles sont fausses. L'image devient donc un substitut de vérité (c'est-à-dire : un produit de remplacement), ce qui est, précisément, l'idolâtrie.Beaucoup, à notre époque, ne veulent plus croire en Dieu, ils ont le genou raide quand il s'agit de se prosterner dans la prière, mais par contre, ils seraient prêts à adorer n'importe quel faux dieu, idole, ou produit de remplacement : "Dior, j'adore".Je ne dis pas que la télévision doive être jetée par la fenêtre, d'ailleurs qui le ferait, surtout s'il a un écran plat ! Par ailleurs, sans doute, la télévision comporte beaucoup d'aspects positifs. Cependant, globalement, ne serait-elle pas comme une machine à générer des idoles, et des idoles encore bien plus redoutables que ce brave veau d'or, que Aaron avait fabriqué en "piquant" les bijoux et colifichets des femmes, qu'elles-mêmes d'ailleurs avaient "piqués" aux Egyptiennes lors de la sortie d'Egypte...Conclusion.Je disais en commençant que je ne parlerais pas de l'évangile d'aujourd'hui, mais comment s'en empêcher ?Dans ce chapitre 15ème de Luc nous voyons Dieu qui est bon au point d'en être "poire". Le portrait des deux fils, qui représentent toute l'humanité, n'est pas très glorieux pour nous ! Ce tableau nous ramène, s'il en était besoin, à la modestie de notre condition, en faisant voir chez les humains un coeur souvent étriqué.Tandis que le coeur de Dieu est immense, au point de ne plus voir le péché. Quand le "p'tit jeune" récite sa leçon apprise par coeur en route : "mon père j'ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d'être appelé ton fils"... le Père ne l'écoute pas. Et même s'il l'écoutait, il ne saurait pas ce que ça veut dire. Par rapport à l'amour fou de Dieu pour sa chétive créature, le péché est un pays lointain, vraiment très éloigné. Le texte le précise plusieurs fois, et ce n'est pas en premier un éloignement géographique. Et même Dieu n'imagine pas ce que ça peut être, le péché. Sauf bien sûr que sur la croix il a dû s'apercevoir que la facture était salée, et saignante.La race humaine, quelquefois, elle ne vaut pas très cher, l'évangile d'aujourd'hui nous le redit, mais Dieu l'a aimée d'un amour fou. Non la vie n'est pas absurde, puisque nous sommes aimés à ce point, à la folie.Au diable les idoles de pacotille, vive notre Dieu, Lui qui est bon comme une poire.

AMEN.

Complément : la première lecture de ce dimanche :

''Yahvé dit alors à Moïse: "Allons! descends, car ton peuple que tu as fait monter du pays d'Egypte s'est perverti. Ils n'ont pas tardé à s'écarter de la voie que je leur avais prescrite. Ils se sont fabriqué un veau en métal fondu, et se sont prosternés devant lui. Ils lui ont offert des sacrifices et ils ont dit: Voici ton Dieu, Israël, qui t'a fait monter du pays d'Egypte." Yahvé dit à Moïse: "J'ai vu ce peuple: c'est un peuple à la nuque raide. Maintenant laisse-moi, ma colère va s'enflammer contre eux et je les exterminerai; mais de toi je ferai une grande nation." Moïse s'efforça d'apaiser Yahvé son Dieu et dit: "Pourquoi, Yahvé, ta colère s'enflammerait-elle contre ton peuple que tu as fait sortir d'Egypte par ta grande force et ta main puissante? Pourquoi les Egyptiens diraient-ils: C'est par méchanceté qu'il les a fait sortir, pour les faire périr dans les montagnes et les exterminer de la face de la terre? Reviens de ta colère ardente et renonce au mal que tuvoulais faire à ton peuple. Souviens-toi de tes serviteurs Abraham, Isaac et Israël, à qui tu as juré par toi-même et à qui tu as dit: Je multiplierai votre postérité comme les étoiles du ciel, et tout ce pays dont je vous ai parlé, je le donnerai à vos descendants et il sera leur héritage à jamais." Et Yahvé renonça à faire le mal dont il avait menacé son peuple.

(Exode 32, 7-14)''

vendredi 10 septembre 2010

Des hommes et des dieux

Après avoir assisté à la projection du film “Des hommes et des dieux”, Clothilde et Marie-Jo, deux paroissiennes de Saint François en Terre de Caux, en Seine Maritime, reviennent interpelées, enthousiasmées et bouleversées. Ce film parle du massacre des moines de Tibhirine en 1996, en Algérie. Aujourd’hui, ce massacre reste un mystère et la vérité n’est toujours pas révélée. Le thème principal du film n’est pas tellement les faits matériels de l’enlèvement, mais la réflexion des moines sur le choix de savoir s’il faut partir ou s’il faut rester malgré les menaces. Leur décision de rester, après beaucoup d’indécisions parmi eux, s’est faite grâce à la prière. Au premier abord, le personnage qui a retenu notre attention a été le Frère Luc, qui depuis 50 ans soignait tous ceux qui lui demandait, rebelles Islamiques y compris, avec l’accord de la Communauté. Il s’occupait d’un dispensaire dans le village et le nombre de ses patients atteignait quelquefois 150 par jour. Les moines étaient dans un vrai partage avec le peuple Algérien. Une des scènes qui nous a bouleversée est “le dernier repas”, qu’ils ont voulu festif en pressentant qu’ils allaient être enlevés. Pendant plusieurs minutes, la caméra montre le visage de chaque moine conscient de leur choix, visage à la fois serein et grave. Si ce film est une réussite, c’est grâce à l’interprétation des acteurs qui se sont réellement investis dans la vie monastique. Grâce aussi au séjour, dans une abbaye, pour suivre le rythme d’une journée de moine et apprendre à chanter les psaumes, ce qui leur a permis de découvrir qu’ils étaient tous frères. Un film vrai, d’une beauté simple et puissante, qui mérite d’être vu et revu.